Haute-Ubaye, quand raid à ski et pandémie ne font pas bon ménage…

Petit Larousse du skieur, page 28. Coronaviré-e, adj, 1) Personne exclue d’un pays ou d’un hébergement en raison d’une pandémie 2) Personne licenciée en raison d’une pandémie.
« Tu es déjà de retour de ton raid Jane ? Oui, j’ai été coronavirée d’Italie en plein milieu… »

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Skieurs dans la tempête, Pas de la Souvagea

Poussés par une météo délicate sur une bonne partie des massifs français, et l’enneigement limité des massifs pyrénéens, nos plans de raid avec Christine s’étaient réduits à deux massifs frontaliers avec l’Italie : le Mercantour ou la Haute-Ubaye. Nous nous sommes donc décidés pour l’Ubaye afin de réaliser le tour du Brec de Chambeyron, et avons fusionné avec des copains (enfin surtout des copines, avec Simon nous étions les intrus parmi Amel, Chacha, Cricri, Jojo et Séverine)   qui se dirigeaient au même endroit.
En arrivant à Maljasset le premier soir, la pandémie de Coronavirus n’était pas encore un gros sujet de préoccupation pour nous : on en rigolait d’ailleurs, « j’espère qu’ils ne vont pas fermer les refuges en Italie pendant notre tour hein ! » 😉

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Maljasset

Le sujet de préoccupation à ce moment là était l’humeur des gardiens, un peu boudeurs à l’arrivée du groupe, et l’itinéraire du lendemain : soit une belle boucle par les cols de Mary / Ciaslaras / infernetto – avec des passages raides et une carte très limitée coté Italien – ou un passage par le pas de la Souvagea pour rejoindre directement le refuge du Brec de Chambeyron. La nivologie un peu tendue couplée à l’absence d’une bonne carte nous fera pencher pour la seconde solution, moins esthétique mais plus sereine.
Le début de la montée dans le vallon de la Souvagea se passe bien, même si la végétation est parfois serrée, et l’ambiance est très belle avec des tours de calcaires qui nous surplombent puis l’arrivée sur un agréable replat en sortie de forêt.

A partir de ce point, le vent qui souffle en tempête sur les sommets devient de plus en plus présent, et l’arrivée au Pas de la Souvagea se transforme en combat dans les bourrasques qui nous déséquilibrent et nous obligent à des pauses régulières en faisant le dos rond. Pour certains, nous choisissons même d’y aller franchement et de monter dré dans le pentu avec le vent dans le dos !
Passé la corniche, nous retrouvons un peu de calme et de soleil avant de plonger sur le refuge : la Pointe D’aval est snobée sans regrets vu les conditions, et elle est de toute façon déplumée par le vent !

Nous passons donc la journée tranquille au refuge, où nous faisons la connaissance de Jean, sympathique guide du Briançonnais. Nous devons à une de ses vannes le fil rouge de notre raid : le blaireau 😉
Le lendemain, notre « blaireaute » anonyme et ses compagnons s’embarquent pour le tour du Brec de Chambeyron par les cols de Gypière et de Stroppia. Une boucle très classique bien que peu skiante, qui offre de belles vues sur le Brec et ses alentours. On atteint rapidement le col de la Gypière, c’est beaucoup plus facile que l’été derniers en tirant les Joëlettes avec Handi’ Cap Evasion !

Nous en profitons pour skier la tête de la Fréma, la montée se fait en crampons car la face est peu enneigée, mais le chemin d’été est en glace. L’arrivée sur la crête sommitale est un régal avec un panorama gigantesque coté Italien. La descente est un peu mieux enneigée, avec une neige transfo encore peu « cuite », agréable sur le haut puis déjà trop molle !

Nous ne le savons pas encore, mais en franchissant la crête frontière nous sommes dans l’illégalité : l’Italie vient de commencer à mettre en place ses mesures de confinement et la pratique d’activités sportives est interdite sous peine d’une grosse amende… Heureusement que personne ne s’est fait mal car si tout se serait certainement bien terminé, on aurait été rudement surpris !!
Le tour se poursuit donc sous un soleil de plomb et une neige qui ne fait pas un carton, et nous renonçons à skier Rocca Blanca dont la face NW est en neige très moyenne. Pour ma part, ça m’arrange bien car je suis à l’agonie depuis un moment, et je vais finir la journée au rythme d’une limace asthmatique au Pas de la Couleta…

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Montée à la Couleta (de bielle)

C’est le soir que nous apprenons la fermeture des refuges italiens, nous avons donc perdu nos hébergements des deux prochains jours à Campo Base et Melezè : il va falloir improviser ! La météo n’est pas non plus excellente les jours à venir, et nous tournons en rond un moment avant de décider une traversée sur Larche où nous aurons la possibilité de faire du ski en étoile.
On repasse donc le lendemain par le Pas de la Couleta, avant de plonger vers le col du Vallonnet sur une neige piégeuse, regelée uniquement sur une fine croute. Ski agréable à condition de se faire léger et de passer avant le dégel ! On file ensuite au col de la Portiolette où une partie du groupe se paye l’aller/retour dans une poudre dense pendant que le reste part faire la sieste plus bas à l’abri du vent.

La neige n’a pas encore transformé et se retrouve blette dès les premières chaleurs, nous descendons donc directement sur Larche un peu découragés… Le ski devient difficile, puis il faut serpenter dans les cailloux avant de finir à pieds sur 200m de dénivelé.
Les nouvelles du monde, la météo, ainsi que l’état de la neige ne sont pas encourageantes, nous plierons donc bagages après cette fin de raid en peau de banane.
Heureusement avec Christine nous aurons la riche idée de nous payer un dernier resto à l’hôtel de la poste à Corps, et un dernier ciné avant d’apprendre la fermeture des lieux publics et l’annonce du confinement !

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Au placard les skis…

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